Un petit flacon de nard fera sortir une jarre de vin
Henri, un ami Wuhanais francophile, pose la question suivante sur un forum :
Que signifie l’expression suivante ?
« un petit flacon de nard fera sortir une jarre de vin »
Si vous connaissez la réponse, laissez un commentaire sans lire la suite.
Sinon, et si comme moi votre curiosité se trouve aiguillonnée par la question, vous allez sans doute googler l’expression, ce qui ne vous donnera pas grand chose.
Je l’ai fait et j’ai d’abord exploré la piste du flacon de nard (ici le nard est un parfum, ailleurs c’est juste une herbe) que Marie Madeleine brise et répand sur la tête du Christ.
Mais ce n’est sans doute pas la bonne source. On retrouve dans le livre IV d’Horace, poète romain qui naquit quelques décennies avant le Christ, une phrase équivalente :
“Un petit flacon de nard fera sortir une de ces amphores qui reposent maintenant dans les greniers de Suspicius, et qui ont la vertu de verser l’espérance à grands flots et de dissiper les amers soucis.
Si ces plaisirs te sourient, hâte toi d’accourir, ton flacon à la main.
Je ne prétends pas t’abreuver de mes vins, comme le riche possesseur d’une maison opulente, sans rien obtenir en échange.
Hâte toi, et trève à l’avarice ; songe, tandis que tu le peux, au bûcher funèbre, et mêle à la sagesse un peu de folie : il est des moments où déraisonner est si doux !”
Joli passage, non ?
Le sens fait référence à ces vins épicés, dont on rehaussait le goût (depuis les romains jusqu’au moyen âge). On perd un petit peu de précieux épices, mais on gagne toute une amphore délicieusement parfumée…
Ce qui correspond très bien à la traduction chinoise que nous avait donné Henri :
抛砖引玉 = Perdre un peu pour gagner beaucoup
En sacrifiant un tout petit peu d’aromates, on peut rehausser toute une amphore de vin.
Etonnant que se perpétue parmi nos amis chinois francophiles une phrase vieille de deux mille ans, totalement tombée dans l’oubli en France !
Nard, spicanard, valériane…. de l’Himalaya à la Galilée en passant par l’Inde, l’Europe centrale, la Grèce et les Celtes, et l’Italie et la Gaule….
Ces plantes, médicinales et symboliques, accompagnent toutes les civilisations.
Le nard, je ne sais, mais la valériane était utilisée pour “rendre fort” et tout guérir, tout en étant utilisée pour dormir ou calmer. Donc en plus de son goût merveilleux ajouté au vin, peut-être le nard stimulait-il aussi ou endormait-il ?
“La valériane a été très consommée au cours des deux guerres mondiales, pour traiter les différents traumatismes nerveux subis par les combattants” Wikipedia
Aujourd’hui, on a perdu de vue toutes ces plantes même si la valériane continue à jouer un rôle en pharmacopée.
Nous sommes si loin de cette nature que nous voudrions rejoindre pour qu’elle nous donne encore un peu d’oxygène.
Le Centre des Ressources Textuelles et Lexicales est plein de ressources….
J’y ai trouvé cela dans : http://www.cnrtl.fr/definition/nard
avec les utilisations de nard dans : http://www.cnrtl.fr/concordance/nard
NARD
BOTANIQUE
A. −Plante herbacée (de l’ordre des Monocotylédones, de la famille des Graminées) raide et piquante, fournissant un pâturage médiocre. Le nard raide (…) croît dans les prés et sur les pelouses des montagnes pyrénéennes (Fén. 1970).
B. − Plante rhizomateuse (de l’ordre des Gamopétales, de la famille des Valérianacées), dont plusieurs espèces permettent d’extraire un parfum estimé:
1. Laissez qu’auprès de vous, dans le gazon roussi,
Comme le ruisseau clair qui coule au pied des aulnes,
Je m’étende, au milieu du nard et des soucis
Où glisse obliquement un peu de soleil jaune.
Noailles, Ombre jours, 1902, p.162.
♦ Nard celtique. Le nard celtique est la valériane celtique, dont la racine nous est envoyée de la Suisse et du Tyrol en paquets ronds et plats, encore garnie de feuilles et mêlée de terre sablonneuse (Nysten 1824).
♦ Nard indien. Le nard indien est d’une odeur forte, d’une saveur amère, et on lui accorde des propriétés stomachiques (Chesn. 1858).
− P. méton. Parfum capiteux, en usage surtout en Orient sous forme d’huile, que l’on extrait du rhizome de certaines de ces plantes (spécialement du nard indien). Si quelque orage nous surprenoit au fond de ces retraites, les esclaves allumoient des lampes pleines du nard le plus précieux d’Arabie (Chateaubr., Martyrs, t.1, 1810, p.254):
2. Pour se donner du coeur, il respira à plusieurs reprises le délicieux parfum qu’exhalait son hostie pontificale. Cette nuit-là, il en sortait une odeur d’encens extraordinaire (…) une odeur suave et pénétrante, qui ne pouvait être comparée qu’à celle de cette huile de nard d’un grand prix que Marie-Madeleine, en cette même veille de Pâques fleuries, répandit aux pieds du Sauveur.
Barrès, Colline insp., 1913, p.218.
Prononc. et Orth.: [na:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1180-90 nardus «nard indien (Nardostachys Jatamansi)» (Alex. de Paris, Alexandre, IV, 1010 in Elliott Monographs, no37, p.343); fin xiie s. nard, narde (Cantique des Cantiques, éd. C. E. Pickford, 503 et 2319); 2. 2e moitié xiiie s. narde celtice «nard celtique (Valeriana Celtica)» (Antidotaire Nicolas, éd. P. Dorveaux, §29, p.15); 1538 nard celtique (Est. ds FEW t.7, p.12b). Empr. au lat. nardus, lui-même emp. au gr. νάρδος, et celui-ci à une lang. sémit. (cf. hébr. biblique nērd ds Cantique 1, 12, araméen nirdā, akkadien lardu) qui a elle-même reçu le mot du sanskrit áladam «nard». (Frisk; Chantraine; Klein Etymol.). Au sens 2, emp. au lat. nardus celtica, et celui-ci au gr. νάρδος Κελτική . Fréq. abs. littér.: 37. Bbg. Sain Sources t.2 1972 [1925] p.311.
Étymol. et Hist. 1. 1180-90 nardus «nard indien (Nardostachys Jatamansi)» (Alex. de Paris, Alexandre, IV, 1010 in Elliott Monographs, no37, p.343); fin xiie s. nard, narde (Cantique des Cantiques, éd. C. E. Pickford, 503 et 2319); 2. 2e moitié xiiie s. narde celtice «nard celtique (Valeriana Celtica)» (Antidotaire Nicolas, éd. P. Dorveaux, §29, p.15); 1538 nard celtique (Est. ds FEW t.7, p.12b). Empr. au lat. nardus, lui-même emp. au gr. νάρδος, et celui-ci à une lang. sémit. (cf. hébr. biblique nērd ds Cantique 1, 12, araméen nirdā, akkadien lardu) qui a elle-même reçu le mot du sanskrit áladam «nard». (Frisk; Chantraine; Klein Etymol.). Au sens 2, emp. au lat. nardus celtica, et celui-ci au gr. νάρδος Κελτική .